Une chanson douce ♪♫♪♪ devenue requiem !
« Le bébé est mort. Il a suffi de quelques secondes. Le médecin a
assuré qu’il n’avait pas souffert […] La petite, elle, était encore vivante
quand les secours sont arrivés… »
Un incipit presque digne de L’étranger de Camus, la curiosité est attisée, on veut en savoir
plus. Beaucoup plus sur ces infanticides perpétrés par cette fascinante et
mystérieuse nounou Louise. « C’est
elle qui tient les fils transparents sans lesquels la magie ne peut advenir.
Elle est Vishnou, divinité nourricière, jalouse et protectrice. Elle est la
louve à la mamelle de qui ils viennent boire, la source infaillible de leur
bonheur familial. »
Sa présence est indispensable, mais reste
temporaire. Paul et Myriam ferment sur elle des portes qu’elle voudrait
défoncer. Elle n’a qu’une envie :
faire monde avec eux, trouver sa place, s’y loger, creuser une niche, un
terrier, un coin chaud. Elle se sent prête parfois à revendiquer sa portion de
terre puis l’élan retombe, le chagrin la saisit et elle a honte même d’avoir
cru à quelque chose.
La descente aux enfers de la famille Massé est très
bien contée par Leila Slimani. Elle réussit à mettre en place une atmosphère
glaciale, oppressante, mettant mal à l’aise le lecteur, devenant petit à petit spectateur
impuissant, par moments on se croirait dans un polar.
Mais au fil des pages, les personnages
s’essoufflent, et perdent en profondeur, notamment celui de Paul le père. C’est
le portrait d’un couple carriériste face à un drame psychologique. L’amer envers
du décor quand on veut concilier vie familiale et vie professionnelle.
Et puis le roman s’arrête, on se rend compte que le
soufflé est retombé et qu’on est loin des promesses de l’incipit. Est-ce que je
suis passée à côté parce que je ne suis plus concernée par les nounous, n’aurais-je
pas vécu cette angoisse comme il se devait ?
Chanson Douce, encensé par la critique, est pour moi, très loin de la révélation
de cette rentrée littéraire. Son premier roman, Dans le Jardin de l’ogre était
plus abouti.
4ème de couverture :
Lorsque Myriam, mère de deux jeunes enfants, décide
malgré les réticences de son mari de reprendre son activité au sein d'un
cabinet d'avocats, le couple se met à la recherche d'une nounou. Après un
casting sévère, ils engagent Louise, qui conquiert très vite l'affection des
enfants et occupe progressivement une place centrale dans le foyer. Peu à peu
le piège de la dépendance mutuelle va se refermer, jusqu'au drame.
A travers la description précise du jeune couple et
celle du personnage fascinant et mystérieux de la nounou, c'est notre époque
qui se révèle, avec sa conception de l'amour et de l'éducation, des rapports de
domination et d'argent, des préjugés de classe ou de culture. Le style sec et
tranchant de Leïla Slimani, où percent des éclats de poésie ténébreuse,
instaure dès les premières pages un suspense envoûtant